Léon J. Tison
(Carnières, 3 november 1895 - Gentbrugge, 25 december 1982)
Léon Jean TISON
Ancien Secrétaire-Général et Président d'honneur de l'Association Internationale des Sciences Hydrologiques.
Professeur émérite de la faculté des Sciences Appliquées de l'Université de Gand (Belgique).
Léon Jean Tison est né le 3 novembre 1895 à Carnières en Belgique. Après un enseignement secondaire à La Louvière, il entra à l'Université de l'Etat de Gand où il obtint le diplôme d'ingénieur civil en 1921. Il fut nommé ingénieur du Service des Ponts et Chaussées (Bruggen en Wegen) dans la Direction de la Meuse où il a pu se spécialiser dans le domaine du génie hydraulique.
Nommé en 1930 maître de conférences à la Faculté des Sciences pour y enseigner l'hydraulique et l'aérodynamique, il fut nommé professeur à la Faculté des Sciences Appliquées en 1937 et fonda dans la même année le Laboratoire d'Hydraulique dont il assurera la direction jusqu'à sa retraite en 1966.
Le premier contact de l'ingénieur Tison avec l'Association d'Hydrologie Scientifique, qui fut établie en 1922, date d'environ 1930 par l'intermédiaire de l'hydrologique tchèque Smetana, un des fondateurs de l'Association. Dans le petit groupe d'hydrologues de l'époque, on sut bientôt évaluer les qualités respectives des adhérents et en 1939 à l'occasion de l'Assemblée Générale de l'UGGI à Washington, on confia au professeur Tison la fonction deSecrétaire-Général de l'Association. Ainsi fût mis entre ses mains le bon fonctionnement de l'unique organisation internationale s'occupant alors de l'eau. Pendant plus de 20 ans, le Professeur Tison sera le seul fonctionnaire international s'occupant journellement de la coopération entre un grand nombre de pays dans le domaine de l'hydrologie. Car c'est seulement vers 1960 que l'attention des organismes des Nations Unies fut attirée par l'hydrologie comme discipline de base du génie hydraulique.
En 1959, fut établie dans le cadre de l'OMM une commission spéciale, appelée actuellement la Commission d'hydrologie avec le Professeur Tison comme vice-président. On demanda la collaboration des membres de l'Association pour les activités des groupes de travail, des groupes de rédaction pour des manuels, etc.
Alors intervint en 1961 le projet grandiose de la Décennie Internationale Hydrologique, la "Décennie". On ne peut pas dire que nous autres hydrologues de l'époque, étions très enthousiastes pour ce projet. On avait l'impression que cette entreprise bien que propre à contribuer de façon spectaculaire au développement de l'hydrologie pourrait présenter des dangers éminents, à la fois pour la nature de la coopération internationale et la position de l'Association. Si finalement l'Association s'est prononcée de façon positive à l'égard du lancement de la Décennie, et plus tard à sa continuation comme Programme Hydrologique International, c'est dû aux larges vues et à l'influence du Professeur Tison.
Il a reconnu que la Décennie Hydrologique, comme instrument gouvernemental, offrait un potentiel puissant pour promouvoir le développement de l'hydrologie comme science moderne, potentiel dont une organisation comme la nôtre ne dispose pas. Ceci n'a pas signifié que le Secrétaire-Général de l'AIHS a accepté sans critique tout ce qu'on jugeait utile pour la coopération internationale nouveau style. Il a veillé à ce que les possibilités de la Décennie ne fussent pas employées à d'autres fins que celles que l'Association avait poursuivies pendant plus de 40 ans. Ainsi a-t-il rendu un service éminent à notre science et il a pu sauver la place de l'Association dans l'ensemble des nombreuses organisations qui, à l'heure actuelle s'intéressent à un ou plusieurs aspects du problème de l'eau.
Mes premiers contacts avec le Professeur Tison remontent à 1951, l'année du congrès de l'UGGI de Bruxelles et j'ai pu entretenir, et très fréquemment, pendant plus de 20 ans les meilleurs relations avec lui. Ceci à l'occasion d'un bon nombre de congrès, de colloques et d'autres réunions scientifiques et administratives où le Professeur Tison a rempli ses fonctions de Secrétaire-Général de notre Association ou bien auxquels il assistant en tant qu'homme scientifique.
En fait, et surtout dans les années soixante, il ne se passait pas une seule année sans qu'il y eut au moins deux réunions organisées par ou sous l'égide de l'AIHS. Ce que je ne savais pas à l'époque c'était que tout le travail préparatoire était le résultat d'un effort volontaire d'une ou deux personnes. Les organisations gouvernementales qui de nos jours s'occupent de l'hydrologie disposent de bureaux, de secrétaires, des facilités d'impression, de budgets assurés, etc. Ainsi ont-elles pu mettre sur pied soit des programmes, soit des commissions techniques ou des activités de soutien. Le Professeur Tison a dû faire tout lui-même en faisant appel à sa femme, son fils Gérard et sa belle-fille. Il l'a fait d'une manière que l'on ne trouve que rarement dans les organisations internationales. Il trouva le moyen d'avoir les papiers scientifiques publiés avant les réunions (la fameuse collection des "livres rouges") bien que entre la réception des derniers papiers et l'ouverture du symposium, il ne restait pas plus de deux mois.
En parcourant le tableau des activités du Professeur Tison pour la promotion de la coopération internationale, on peut s'étonner qu'il ait pu encore trouver le temps et l'énergie pour participer aux travaux scientifiques proprement dits. Des dizaines de publications entièrement vouées à des sujets hydrologiques et de haute qualité témoignent cependant d'une contribution importante et directe à l'émancipation de l'hydrologie à une époque où celle-ci figurait comme compilation de tableaux de données. Ces quelques dizaines n'incluent pas le grand nombre de publications sur l'érosion et le transport de matières solides par les cours d'eau, questions que l'on pourrait plutôt classer dans les dossiers de l'hydraulique.
Comme le Professeur Tison l'a dit lui-même, l'hydraulique et l'hydrologie dans les petits pays sont souvent exercées par les mêmes savants. Il convient toutefois d'ajouter qu'il n'est pas donné à tous d'apporter une contribution substantielle à ces deux disciplines comme il l'a fait. Ses publications dans la catégorie hydrologie se rapportent aux eaux de surface aussi bien qu'aux eaux souterraines et dans chacun de ces domaines, on trouve une diversité de sujets.
Léon Tison était un homme aimable et gai, toujours prêt à aider les autres et à parer à des difficultés tant que les intérêts de l'Association n'étaient pas en jeu. Aux réunions et surtout aux dîners, il avait toujours une anecdote ou petite histoire à raconter dont certaines sont devenues fameuses. Il aimait profondément sa femme et ses enfants et il a dû connaître la joie de vivre. Les distinctions honorifiques, nationales et internationales ne lui ont pas manqué. Il reste pour nous l'image d'un homme exceptionnel qui a été le pivot de la coopération internationale pour le développement de l'hydrologie pendant trois décennies.
En reconnaissance des services rendus à l'Association, celle-ci lui a décerné en 1981 la médaille d'argent attribuée pour la première fois.
A. Volker
Ancien Président de l'Association des Sciences Hydrologiques